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Les deux événements astronomiques exceptionnels de l'année 1937.


roger15

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Les deux événements astronomiques exceptionnels de l'année 1937.

 

 

 

Bonjour à toutes et bonjour à tous, :)

 

Il se trouve que dans mes archives j'ai deux documents très intéressants concernant l'année 1937 :

 

- 1°) d'abord "l'Annuaire Astronomique et Météorologique Camille Flammarion pour 1937" (73ème année), publié par l'imprimerie "Jouve et Cie" 15 rue Racine (Paris 6ème) ;

 

- 2°) ensuite "l'Annuaire pour l'an 1937 publié par le Bureau des Longitudes" (142ème année), publié par la librairie "Gauthier-Villars" 55 quai des Grands-Augustins (Paris 6ème).

 

 

Le premier phénomène exceptionnel de 1937 est le passage tangentiel de Mercure devant le Soleil du 11 mai 1937.

 

 

A la page 426 de "l'Annuaire Astronomique et Météorologique Camille Flammarion pour 1937" on trouve ce très intéressant article :

 

« Un phénomène extrêmement rare : Le Passage tangentiel de Mercure devant le Soleil du 11 mai 1937.

 

Monsieur Maxime de Saussure a calculé les éléments de ce passage en utilisant une modification de la méthode classique de Lagrange, mieux adaptée à ce phénomène spécial d'un passage « rasant » de Mercure devant le Soleil. D'après ses calculs, Monsieur de Saussure trouve que Mercure entre au maximum de 7",7 (son diamètre étant 12",0) sur le disque solaire. Nous avons dit, page 215, que Monsieur le Docteur A. C. D. Crommelin trouvait une entrée maximum de 10",7 soit 3" plus forte que celle donnée par Monsieur de Saussure. Il est à remarquer que la valeur de 7",7 est presque identique à celle donnée par le Nautical Almanac (7",3) ou la Connaissance des Temps (7",8).

 

Monsieur de Saussure a tracé la Carte générale du phénomène que nous sommes heureux de donner ici, figure 91 [page 415]. On y voit les courbes réunissant les lieux où le phénomène débute ou finit au lever ou au coucher du Soleil, et la limite boréale de visibilité ; cette dernière courbe n'existe que dans le cas rarissime d'un passage comme celui-ci, où l'ombre ne traverse pas la Terre entière. Il n'y a pas de limite australe. Le phénomène sera donc visible des régions indiquées par cette carte. Pour l'Europe, le Soleil sera au-dessus de l'horizon, mais la planète n'entrera pas sur le disque solaire. Cependant son bord s'approchera de quelques secondes d'arc seulement du bord solaire et on pourra, comme nous le disons page 215, la distinguer à l'aide d'un spectroscope (par exemple en utilisant la raie rouge H alpha de l'hydrogène) se détachant en noir sur la chromosphère du Soleil, de même façon qu'on observe les protubérances. Et Monsieur de Saussure ajoute qu'il sera peut-être possible de mesurer ainsi la distance des bords afin de remplacer l'observation des contacts, impossibles dans nos régions. »

 

Dans "l'Annuaire pour l'an 1937 publié par le Bureau des Longitudes" ce qu'on dit de ce "passage tangentiel" de Mercure devant le disque du Soleil du 11 mai 1937 est extrêmement bref, puisqu'on n'en dit rien !... A la page 50 il n'y a qu'un simple tableau qui indique ceci :

 

« Le 11 mai, passage partiel de Mercure sur le disque du Soleil, invisible à Paris.

 

Pour le centre de la Terre on a :

 

* Premier contact extérieur : 8h 50mn 52,4 s (151",8 d'angle de position par rapport au centre du Soleil, compté du Nord vers l'Est) ;

 

* Plus courte distance des centres (15' 55",20) à 8h 59mn 48,6s (154",0 d'angle de position) ;

 

* Dernier contact extérieur : 9h 08mn 45,2 s (156",1 d'angle de position).

 

Ce passage est visible au Sud de l'Asie, aux Philippines, à l'Ouest de l'Australie, dans l'Océan Indien, au centre et au Sud de l'Afrique. »

 

Ce phénomène était donc bien "rarissime", mais quand avait-il eu lieu la dernière fois, et quand se reproduirait-il ? :?: Personne n'était en mesure de répondre à ces deux interrogations en 1937. :(

 

A peu de chose près on en savait autant sur la périodicité des passages de Mercure devant le disque du Soleil que du temps de "l'Astronomie populaire" de François Arago (1786-1853) rédigé au milieu du dix-neuvième siècle : Tome II, Livre XVIII, Chapitre III (pages 493 à 498 - http://visualiseur.bnf.fr/CadresFenetre?O=NUMM-3466&I=529&M=imageseule).

 

Même en février 1971 le brillant astronome-calculateur du Bureau des Longitudes Bruno Morando (1931-1995) n'a pas donné la réponse à ces deux interrogations dans son excellent article "Les passages des planètes inférieures devant le Soleil"

http://articles.adsabs.harvard.edu/cgi-bin/nph-iarticle_query?1971LAstr..85...45M&data_type=PDF_HIGH&whole_paper=YES&type=PRINTER&filetype=.pdf.

 

Il a fallu attendre l'avènement de l'informatique et d'Internet pour enfin pouvoir enfin savoir la réponse... :be: :be: :be:

 

Patrick Rocher, le meilleur spécialiste français actuel de la Mécanique Céleste à l'IMCCE (Institut de Mécanique Céleste et de Calcul des Ephémérides) a fait paraître son "canon des passages de Mercure devant le Soleil" pour une période de 6000 ans : les 809 passages de Mercure sur le disque du Soleil entre -2999 et +3000 ; http://www.imcce.fr/fr/ephemerides/phenomenes/passages/html_passage/CanonMercure.php#08/10/-2992.

 

Et en fin de ce "canon" on trouve cette statistique très intéressante :

 

« Statistique générale sur tous les passages compris entre ces deux dates

· Nombre de passages centraux : 2.

· Nombre de passages non centraux : 796.

· Nombre de passages partiels : 11.

· Nombre de passage au nœud descendant : 255.

· Nombre de passage au nœud ascendant: 554.

· Nombre total de passages : 809. »

 

Il y a donc eu onze passages partiels en 6000 ans. Ce "canon" nous apprend que le précédent, avant celui du 11 mai 1937, a eu lieu le 21 octobre 1342 (celui d'encore avant le 28 octobre 960) et que le prochain n'aura que le 13 mai 2608 (et celui d'après qu'à la fin du sixième millénaire, le 21 juin 5909 - comme cette date excède, et de très loin, les données du "canon" de Patrick Rocher, je l'ai obtenue grâce à mon excellent logiciel astronomique "Guide 8").

 

Vous voyez que "l'Annuaire Astronomique et Météorologique Camille Flammarion pour 1937" avait bien raison : un passage partiel de Mercure devant le disque du Soleil est vraiment un phénomène extrêmement rare.

 

 

 

Le second phénomène exceptionnel de 1937 est la durée exceptionnellement longue de la totalité de l'éclipse totale de Soleil du 8 juin 1937.

 

 

 

A la page 212 de "l'Annuaire Astronomique et Météorologique Camille Flammarion pour 1937" on peut ceci à propos de cette éclipse exceptionnellement longue :

 

« La plus grande durée de la phase totale sera de 7 minutes 4 secondes dans le lieu situé par une longitude de 130° 40' Ouest et une latitude de 9° 25" Nord, c'est-à-dire dans l'Océan Pacifique. D'ailleurs, la plus grande partie de la zone de totalité se trouve en plein Océan Pacifique, ne traversant que de rares îles d'un accès plutôt difficile pour des missions scientifiques. La fin seule de cette zone aborde la côte occidentale de l'Amérique du Sud, dans les régions du Sud du Pérou. »

 

Bref, cet "annuaire" n'insiste guère - et même pas du tout - sur la longueur exceptionnelle de la totalité de cette éclipse !...

 

Quant à "l'Annuaire pour l'an 1937 publié par le Bureau des Longitudes" il en dit, page 48, encore moins ; ainsi la durée de la totalité n'est même pas indiquée !... Cet "annuaire" précise seulement que la grandeur de cette éclipse est de 1,038 (le diamètre du Soleil étant un) ; alors que "l'annuaire" Flammarion indiquait une grandeur de 1,028.

 

"l'Annuaire" Flammarion précisait, lui, à propos des "trois" [en réalité il y a eu "quatre" éclipses en 1937 : deux de Soleil et deux de Lune, dont une par la pénombre (le 25 mai 1937), type d'éclipses qui ne seront prises en compte qu'à partir de 1951 en France] éclipses de 1937 que « on sait que ces phénomènes sont régis par le cycle de 18 ans et 11 jours. Elles sont donc le retour des éclipses de 1919. »

 

 

Pour apprécier la longueur exceptionnelle de l'éclipse totale du 8 juin 1937, il faut consulter l'excellent site Internet de Xavier Jubier "Cinq Millénaires (-1999 à +3000) d’Eclipses Solaires" (http://xjubier.free.fr/site_pages/solar_eclipses/5MCSE/xSE_Five_Millennium_Canon.html).

 

Grâce à ce site on apprend à propos de cette éclipse que la durée de la totalité était bien de 7 minutes 04 secondes (424 secondes), que sa grandeur maximum était de 1,07510 et que la largeur de la bande de totalité était de 249 kilomètres. On apprend également que cette éclipse faisait partie du saros n° 136 qui comportera en tout 71 éclipses (1ère éclipse partielle : 14 juin 1360 ; dernière éclipse partielle : 30juillet 2622). L'éclipse du 8 juin 1937 était la 33ème de ce saros.

 

Voyons l'évolution de la durée de la totalité sur les vingt premières éclipses totales de ce saros n° 136 :

 

- 1ère éclipse totale de ce saros n° 136 : 8 février 1739 = 1 minute 27 secondes de totalité ;

 

- 2ème éclipse totale de ce saros n° 136 : 18 février 1757 = 1 minute 51 secondes de totalité ;

 

- 3ème éclipse totale de ce saros n° 136 : 1er mars 1775 = 2 minutes 20 secondes de totalité ;

 

- 4ème éclipse totale de ce saros n° 136 : 12 mars 1793 = 2 minutes 51 secondes de totalité ;

 

- 5ème éclipse totale de ce saros n° 136 : 24 mars 1811 = 3 minutes 27 secondes de totalité ;

 

- 6ème éclipse totale de ce saros n° 136 : 3 avril 1829 = 4 minutes 05 secondes de totalité ;

 

- 7ème éclipse totale de ce saros n° 136 : 15 avril 1847 = 4 minutes 44 secondes de totalité ;

 

- 8ème éclipse totale de ce saros n° 136 : 25 avril 1865 = 5 minutes 23 secondes de totalité ;

 

- 9ème éclipse totale de ce saros n° 136 : 6 mai 1883 = 5 minutes 58 secondes de totalité ;

 

- 10ème éclipse totale de ce saros n° 136 : 18 mai 1901 = 6 minutes 29 secondes de totalité ;

 

- 11ème éclipse totale de ce saros n° 136 : 29 mai 1919 = 6 minutes 51 secondes de totalité ;

 

- 12ème éclipse totale de ce saros n° 136 : 8 juin 1937 = 7 minutes 04 secondes de totalité ;

 

- 13ème éclipse totale de ce saros n° 136 : 29 juin 1955 = 7 minutes 08 secondes de totalité ; c'est l'éclipse la plus longue de ce saros !... C'est d'ailleurs la plus longue totalité d'une éclipse pour le vingtième siècle ;

 

- 14ème éclipse totale de ce saros n° 136 : 30 juin 1973 = 7 minutes 04 secondes de totalité ; la durée de la totalité commence déjà à décroître... ;

 

- 15ème éclipse totale de ce saros n° 136 : 11 juillet 1991 = 6 minutes 53 secondes de totalité ;

 

- 16ème éclipse totale de ce saros n° 136 : 22 juillet 2009 = 6 minutes 39 secondes de totalité ;

 

- 17ème éclipse totale de ce saros n° 136 : 2 août 2027 = 6 minutes 23 secondes de totalité ;

 

- 18ème éclipse totale de ce saros n° 136 : 12 août 2045 = 6 minutes 06 secondes de totalité ;

 

- 19ème éclipse totale de ce saros n° 136 : 24 août 2063 = 5 minutes 49 secondes de totalité ;

 

- 20ème éclipse totale de ce saros n° 136 : 3 septembre 2081 = 5 minutes 33 secondes de totalité.

 

Je vous souhaite, à toutes et à toutes d'être encore de ce monde pour observer cette très belle éclipse totale de Soleil du mercredi 3 septembre 2081, dans 71 ans, car, cerise sur le gâteau, elle sera visible en France !... La ligne de centralité passera à une centaine de kilomètres au Sud de Paris.

 

Roger le Cantalien. :rolleyes:

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Tu vas faire ça pour toutes les années ?

 

Bonjour Christophe, :)

 

Non, et ceci pour deux raisons :

 

- 1°) d'abord, il faudrait pour cela que j'aie tous les annuaires astronomiques français (celui de Camille Flammarion, celui du Bureau des Longitudes et surtout la prestigieuse "Connaissance des Temps") pour toutes les années du 19ème et du 20ème siècle, ce qui est très très très loin d'être le cas (c'est pourquoi, j'aimais bien aller dans mon adolescence au siège de la Société Astronomique de France demander au bibliothécaire Robert Sagot [que j'ai évoqué dans mon sujet « Qui a été votre "Maître" en astronomie ? » - http://www.webastro.net/forum/showthread.php?t=21346] de me sortir une douzaine d'exemplaires de ces trois merveilleux annuaires pour m'immerger dans le monde des astronomes amateurs et professionnels de ces années là... :wub: :wub: :wub: ) ;

 

- 2°) ensuite, cela ne pourrait concerner que des années que je trouve "intéressantes" vu les phénomènes astronomiques qui s'y sont déroulés. Mais ce qui m'intéresse, n'intéresserait pas forcément les autres Internautes... ;)

 

Dans le sujet actuel, surtout en ce qui concerne l'évolution de la durée de la totalité pour vingt éclipses successives d'un saros, j'ai voulu montrer que grâce à Internet, si on se donne la peine de rechercher les sites adéquats, on peut faire un fabuleux voyage dans le temps. C'est sans doute Éloi-Henri Géneslay qui m'en a donné l'idée dans son article de "l'Astronomie" de juillet 1960, pages 329 à 335 "Le Saros et le succession des éclipses" : http://articles.adsabs.harvard.edu/cgi-bin/nph-iarticle_query?1960LAstr..74..329G&data_type=PDF_HIGH&whole_paper=YES&type=PRINTER&filetype=.pdf.

 

 

Roger le Cantalien. :rolleyes:

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Bonjour Roger :)

 

Tu restes égal à toi-même avec ce sujet : vraiment excellent !:be::be:. Je vois que ta documentation est quand même assez musclée. C'est un peu le privilège des anciens qui ont accumulé (et gardé) tous les documents reçus et trouvés au fil des années. Continue à nous en faire profiter :p:p. Un forum d'astronomie c'est fait aussi pour s'instruire.

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